Tout s'était passé si vite. Je n'avais rien vu venir. Je lui ai seulement dis une chose... Je lui ai seulement demandé pourquoi il ne voyait plus ses parents et... mon maître s'est enflammé. Sans que je puisse l'arrêter, il me plaqua au mur. Sa main droite enserrait ma gorge, l'autre retenait fermement mes poignets au-dessus de ma tête. Il m'avait totalement immobilisé, ses hanches contre les miennes ne me laissaient pas indifférent.. Il était si proche... Je sentais presque mes joues s'empourprer, même si ce n'était pas le moment. Lorsque je levai mes yeux en direction des siens, je n'y distinguais qu'une seule chose: de la colère mêlée d'un éclat de tristesse. Jamais auparavant, je n'avais vu ses iris violettes prendre une telle expression.
"Ne me demande plus jamais ça. Jamais, tu entends..?"
Je n'osai pas répondre, me contentant de baisser les yeux. Pour la première fois, j'avais peur de mon maître. Lui qui avait toujours été patient et gentil avec moi, lui qui souriait sans cesse, même lors de ses moments de faiblesse. Lui qui ne m'obligeait pas à lui lécher les pieds pour avoir droit à un repas.
A présent, je ne voyais que cette expression de colère sur son visage... Et celle-ci se traduisait par sa forte poigne autour de ma gorge. Il me serrait tellement fort que je n'aurais su dire s'il souhaitait me tuer ou m'empêcher de respirer... Dans les deux cas toute fois, il me faisait atrocement souffrir... Comment cela avait-il été possible? Pourquoi la main qui m'avait sortit de l'oubli et de la solitude dans laquelle j'étais plongée me faisait-elle si mal?
J'avais également l'impression de l'avoir profondément déçu... Qu'il ne parviendrait jamais à me pardonner... Comment en étions arrivés là..?
"Vous... Vous me faites mal.." Essayai-je d'articuler tant bien que mal tandis que sa poigne se faisait toujours sentir... Et si je ne sentis aucun changement, je ne mis pas longtemps à remarquer que ses mains tremblaient.. Finalement, il me lâcha... Et je le sentis me pousser en direction des escaliers.
"Monte et ne descend pas sans mon autorisation" Même s'il essayait d'être neutre et dur à la fois, je remarquai bien que quelque chose n'allait pas... Et peut-être que ce fut pour cela qu'il détourna le regard lorsque j'essayais de voir ce que disaient ses yeux. Lentement, il tendit le bras vers l'étage
"Monte, je t'ai dis!"
Me relevant, je m'inclinai brièvement et montai en toute hâte les escaliers pour me diriger vers ma chambre et m'asseyai sur le lit qu'il m'avait accordé. En bas, même en tendant l'oreille, je n'entendais rien. Peut-être était-il sortit? Peut-être refusait-il de me voir anouveau? Au fond, je me sentais profondément coupable. Peut-être ferais-je mieux de partir d'ici et de ne plus jamais revenir...?

- En bas, pendant ce temps -

Je venais tous juste d'envoyer mon petit servant à l'étage. Moralement, j'étais au plus mal. Cela expliquait le fait que je me sois mollement laissé tombé sur le canapé du salon et que... Je pleurais? Oui. C'est ca. De l'eau longeait mes joues. Il fallait dire que mon moral était vraiment très bas. Ce que je venais de faire m'était tout bonnement impardonnable, cela ne me ressemblait pas. Qui plus est, à trop pleurer, j'avais atrocement mal à la tête... Mais, quand on y repensait, je n'avais pas le droit de me laisser aller de la sorte. J'étais l'aîné d'une famille importante, je ne pouvais pas me permettre de faiblire à cause d'un problème avec un servant, cela salierait ma réputation... Mais après tout, n'est-elle pas déjà assez souillée comme cela? J'avais fuis mes obligations en fuguant la veille de mon mariage arrangé, je ne m'étais jamais entendu avec mon père et j'avais laissé mon rôle de grand frère de côté pour mes petits plaisirs personnels. N'était-ce pas déjà assez pour ternir notre famille? D'ailleurs, c'était pour cela que je n'aimais pas en parler. Après tout le mal que je leur avais fait, je ne pouvais même pas me permettre de les regarder une fois encore dans les yeux. Même mon reflet dans la glace, je ne parvenais pas à en soutenir la vue. J'étais un abruti, un vrai. Sans aucun doute.
Je tremblais et je pleurais à présent, recroquevillé sur moi-même et recouvert d'une fine couverture de laine. Visiblement, il me faudrait du temps pour retrouver un état normal... Et encore, c'est quoi, la normalité, pour vous? Certainement pas de vivre avec un servant, n'est-ce pas?
C'était d'ailleurs pour cela que je l'avais envoyé dans sa chambre, je n'aurais pas supporté qu'il me voit dans cet état. J'étais sans doute le plus pitoyable des maîtres qu'il avait eut. Méritais-je encore mon titre à ce train-là?
J'essayais de me calmer durant plusieurs minutes qui me semblaient interminables.. Lorsque mon paysage se fit moins enfloué, je me levai du divan, ma couverture toujours sur les épaules. Je passai par le couloir pour arriver à la cuisine.. Mais se fut sans compter sur ma nostalgie qui me rattrappa au galop lorsque je passai devant une photo que j'avais faite avec lui au début de notre rencontre. Lui et moi souriions.

"C'est.. Cest toi..? Tu.. M'es vraiment.. Revenu..?"
Le dernier mot se perdit dans le silence en un souffle.. Je n'y croyais pas.. Je ne pouvais pas y croire.. Lui.. Ici..?
Je me frottais les yeux, peut-être mon esprit me jouait-il des tours? Peut-être n'était-ce que le fruit de mon envie la plus profonde de le revoir qui avait prit le dessus? Lorsque je regardai anouveau devant moi, il n'avait pas bougé.. Il était toujours là, debout, devant moi.
Lentement, je me mise à avancer vers lui... Plus je m'approchais, plus la certitude de la réalité qui se présentait à moi était forte. Finalement, je me trouvai très proche de lui. Je posai mes mains sur son visage, ses joues, ses épaules... Je voulais vraiment m'assurer que je ne me trompais pas. Il avait une réelle consistance... Il était en chair et en os, devant moi. Il devait sans doute me prendre pour une folle mais c'était plus fort que moi. Mes yeux se brouillèrent alors de larmes tant je n'arrivais pas à y croire. Et ce fut alors que je ressentis plusieurs émotions se mêler en moi.
Tristesse, colère, soulagement et une immense envie de crier. A présent, je ne me retenais plus. J'étais tellement énervée contre lui que je me mise à le frapper de mes poings sans pour autant y mettre de la force, je ne voulais pas le blesser.
"Idiot! Imbécile! Pourquoi tu es partis comme ça?! Pourquoi!? Pourquoi?! Imbécile! Crétin! Je te déteste! Tu n'avais pas le droit.."
Mes coups se firent plus faibles puis disparurent. Seuls mes poings restaient à la hauteur de ses épaules, je ne prenais même plus la peine de dissimuler mes sanglots. J'appuyai ma tête contre son torse puis je me laissai tomber contre lui
"Tu sais très bien que j'ai peur d'être seule... Alors pourquoi?.. Pourquoi tu m'as laissée seule durant tout ce temps.. Crétin... Imbécile.. Tu n'avais pas le droit.."
Je laissais libre court à mes larmes qui prenaient le dessus sur mes paroles..

Doux souvenirs,
Kaléidoscope de photos, d'époque, d'âge et de bonheur différent.
Une vie illustrée par quelques clichés.
Une existence, vécue à travers des sourires et des larmes,
bercée d'une naïveté infantile et d'utopies passagères
Un monde, une évolution.
Des actes, des pensées et des joies qui m'ont fait devenir moi
Des jours qui passent, se suivent, différent les uns des autres
Des existences qui se rencontrent, qui s'entrecroisent, qui se séparent
Une avancée, peut-être lente, peut-être incertaine,
mais qui continue malgré tout de se former
Des expériences, bonnes ou mauvaises, apportant larmes ou rires, regrets ou joies
Des souvenirs, douce nostalgie d'un passé que l'on laisse derrière soi,
mais de qui on apprend, car on ne l'oublie pas.
Mais surtout et avant tout: l'histoire d'une personne.
Elle n'est peut-être plus celle que vous connaissez
Elle est sans doutes celle que vous rencontrerez
Mais en tous cas, il s'agit de celle qui a écrit son inspiration passagère
Celle qui s'est arrêtée devant un tableau
Celui bercé de photos qui lui font repenser à ce qu'elle est aujourd'hui